Rencontre avec Clémence Cireau de la Librairie La Touriale - Bouquinerie des Cinq Avenues à Marseille
Comment et pourquoi êtes-vous devenu(e) libraire ?
Clémence Cireau J'étais journaliste au Québec. À mon retour en France, j'ai décidé de devenir libraire, enfin. J'en rêvais depuis ma petite enfance rochelaise où ma mère m'emmenait choisir des piles de livres à la Librairie Gréfine que je dévorais ensuite lors des longues journées en mer ou les nuits bercées par le clapot au mouillage. Je voulais être entourée de livres toute la journée, toucher leur multitude, retrouver la magie de ces longues heures d'ennui somptueux. J'ai donc intégré un IUT Métiers du Livre et je suis devenue libraire à Marseille un an après.
Parlez-nous un peu de votre librairie et de votre équipe.
C. C. La Touriale est une histoire familiale. La librairie est rouge carmin, tout en long, et le sous-sol est rempli de livres d'occasion, une oasis de calme sur un boulevard tonitruant. J'y travaille avec Jeanne Gilhodes et son père Alain, qui a repris la boutique il y a une dizaine d'années. Deux personnalités d'une grande générosité qui ont su faire de leur librairie un repère dans le quartier. Grâce à leur confiance, j'ai pu lancer Raboul, une association de lectures immersives pour les enfants. Le sous-sol s'est alors transformé en cabane enchanteresse !
Racontez-nous une anecdote amusante avec un client...
C. C. Le dernier gros fou rire que j'ai eu à la librairie, c'est lors du dernier confinement. Une dame est venue nous demander si elle pouvait commander un livre. Elle nous glisse son papier à travers la grille et repart. Quelques minutes après, elle revient avec l'air affolée. « Dites, j'ai un affreux doute, quand vous commandez des livres, vous passez pas par Amazon quand même ? » Je suis restée choquée, il y a encore besoin de communiquer sur notre travail !
Quel est votre livre fétiche ?
C. C. L'édition en version originale de Cien años de soledad de Gabriel García Márquez, magnifiquement illustrée par Luisa Rivera, parue à l'occasion du cinquantième anniversaire de sa publication. Les mots apparaissent en transparence à travers des pages de couleur perforées de larmes. Il doit peser un bon kilo, je le balade partout. C'est devenu un totem : j'y ai glissé des plumes de flamants roses de Camargue, des fougères séchées des Asturias, une recette de pain à la farine de châtaigne, des dessins d'un tirage de tarot lotois, etc.