Réel

Avec ce huis clos haletant, Sébastien Gendron plonge dans le monde des adolescent rempli de téléphones portables et de réseaux sociaux, dans lequel le voyeurisme dicte la loi contre tout respect de la vie privée.

Les étudiants du lycée George-Sand ressemblent à plein d’autres adolescents français : ils passent tout leur temps sur leurs téléphones portables, ils chattent, ils likent, ils filment tout ce qu’ils trouvent drôle, gênant et même ordinaire, et le reversent sur les réseaux sociaux. Quand un nouveau professeur assez zélé leur propose un exercice artistique en utilisant leur propre téléphone portable, personne n’imaginait qu’un cyclone allait être déclenché. Des vidéos liées à la vie privée des étudiants apparaissent alors sur les réseaux mais l’auteur de ces tournages reste introuvable. Quel est son but ? Pourquoi violer l’intimité de ces adolescents ? Est-il dangereux ? Tant de questions qui enflent et qui poussent Maude à vouloir en savoir plus, quitte à être filmée à son tour. Sébastien Gendron réussit à créer une intrigue palpitante et assez oppressante autour d’une problématique tout à fait contemporaine, à savoir l’usage surdimensionné des réseaux sociaux dans nos vies et en particulier dans celles des adolescents. Tout se filme et se commente, rien ne semble exister en dehors du Net. Par ailleurs, grâce à son écriture fluide et mimétique, l’auteur arrive à restituer une atmosphère tout à fait lycéenne. Les échanges entre professeurs et élèves contribuent à nous sentir au plus près de l’action. Et si la fin ouverte du roman pourrait apparemment nous laisser sur notre faim, elle laisse planer le doute : il ne s’agit pas là que d’une fiction et les risques liés à un mauvais usage de la technologie sont bien présents. Porteur d’une critique virulente des fortes dérives de notre société orwelienne, ce roman peut être le moyen d’aiguiser la sensibilité des jeunes à leur rapport à la technologie, aux fake news, ainsi qu’aux questions d’atteinte à la vie privée et au harcèlement.