Benoît Séverac écrit des polars. Ça n’est donc pas un hasard si son dernier roman relève de la même veine. Ce qui est plus surprenant cette fois, c’est la période choisie: la Préhistoire. Et c’est là toute la force et la grande originalité de ce texte. Préparez-vous à un grand voyage dans le temps.
Ce roman nous transporte dans le passé, il y a 30 000 ans, aux côtés de Mounj, un Homme-droit. Au sein de sa tribu, il est quelqu’un d’important, presque autant que le chef du clan. Comme son père, son grand-père et bien d’autres hommes de la famille avant lui, il est l’Homme-qui-dessine, celui auquel échoit d’explorer le monde et de rapporter à son groupe les nombreuses aventures et rencontres qu’il aura faites durant ses voyages. Mounj est aussi chargé de dessiner – d’où son nom – et de retranscrire, notamment sur de l’écorce de bouleau, chacune de ses découvertes. Il est le gardien de la mémoire de son clan. Mais aujourd’hui, celui-ci est menacé d’extinction. En effet, la tribu de Mounj, comme la majorité des Hommes-droits, est touchée par un mal étrange. Mounj est donc parti plus loin que n’importe quel Homme-qui-dessine à la recherche d’une femme avec qui il pourrait assurer la survie des siens. Son périple est cependant interrompu par la découverte d’un corps, près d’une rivière. Il s’agit du cadavre d’un Homme-qui-sait, peuple différent de celui de Mounj, mais avec qui il cohabite pacifiquement. Pourtant, Mounj semble bien suspect quand plusieurs Hommes-qui-savent le surprennent à côté de la dépouille d’un des leurs. Il est aussitôt emmené dans la tribu des Hommes-qui-savent, laquelle vit dans une immense grotte tout près du lieu du crime. Car c’en est un, indubitablement : l’homme retrouvé mort dans la rivière a été tué d’un coup de sagaie dans le ventre. Mounj est présenté au chef des Hommes-qui-savent, Djub. Celui-ci apprend alors à Mounj que c’est le sixième homme tué de cette façon en moins d’une lune. Mounj, de façon ingénieuse, propose alors un marché à Djub. Il retrouvera le coupable avant sept jours ou sera exécuté. Le chef accepte à la condition que l’Homme-qui-dessine soit sous l’étroite surveillance de ses deux fils, Maï et Haoud. Les deux frères sont très différents, autant physiquement que moralement. Alors que Maï se prend d’amitié pour Mounj, Haoud l’a, quant à lui, déjà condamné pour ces crimes. Commence alors, pour l’étranger que tout semble accuser, une enquête passionnante au cœur d’un environnement hostile. Mounj devra faire preuve de courage et de ruse pour mettre à jour un secret bien gardé par les personnes les plus puissantes du groupe. L’Homme-qui-dessine est un roman palpitant qui dépeint la Préhistoire comme si on y était. Passées les premières pages un peu déroutantes, on s’imagine très vite au sein de la tribu, parmi ces Hommes-qui-savent finalement assez proches de nous. Des thématiques comme l’homosexualité ou la peur de l’autre donnent à ce texte une résonance toute particulière sur des sujets d’actualité. L’Homme-qui-dessine reste de la fiction, mais les données scientifiques avancées ont été validées par Francis Duranthon, directeur du Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse. Benoît Séverac a bien fait les choses et nous propose une vraie nouveauté dans le paysage de la littérature jeunesse.