La tradition du Phajaan consiste à capturer un jeune éléphant pour le rendre docile. Le jeune Kiet s’insurge contre cette pratique qu’il juge cruelle. On partage sa révolte dans ce roman puissant et précieux.
Kiet, 10 ans, est élevé pour devenir comme son père un Mahout, c’est-à-dire un dresseur d’éléphants. Le jeune éléphant, appelé Sura, qui va être capturé pour lui, deviendra sa propriété. Le jeune garçon nous raconte comment la prise et le dressage de Sura se déroulent. Conscient de la cruauté de cette pratique, il se demande « comment décrire le Phajaan sans provoquer, chez ceux qui en entendent parler pour la première fois, de l’incrédulité et de la répulsion ». Le lecteur fait partie de ceux-là et l’on découvre, horrifié et stupéfait, combien l’homme peut être cruel quand il décide de faire plier un animal à sa propre volonté. Kiet ne se résout pas à maltraiter les éléphants et particulièrement Sura, avec lequel il va construire une relation forte. Un moine bouddhiste dont il est l’ami partage avec lui sa conception de la vie et de la relation aux autres. L’une de ces valeurs, que Kiet ressent au plus profond de lui, est que « si tes actions sont mauvaises pour un autre être vivant, elles sont mauvaises pour toi et mauvaises pour l’univers ». Le jeune garçon finira par se révolter et fera preuve d’un courage immense pour s’émanciper de ces traditions qu’il désapprouve, porté par l’amitié solide et sincère qui l’unit à Sura. La Loi du Phajaan est un livre court et puissant. On peut certes le lire comme un récit du traitement infligé aux éléphants mais son propos dépasse ce cadre-là, car l’histoire de Kiet résonne plus largement, pointant la relation qu’entretient l’homme avec les animaux. « L’idée qu’on aurait dû ne jamais poser la main sur un éléphant, même pour une caresse, me semble salutaire. […] Nos règles sociales ne sont pas les leurs et l’humain, dans son entêtement et son manque de respect, s’efforcera toujours de plaquer sa morale sur le libre comportement des animaux. »