Au sein d’une rentrée littéraire jeunesse aussi riche et diverse que peut l’être celle du domaine adulte, les exigeantes et créatives éditions du Rouergue nous surprennent et publient le premier tome d’une trilogie fantastique. Intemporia, Le sceau de la reine inaugure la nouvelle collection « épik », dont on découvre déjà le meilleur.
Afin de prévenir l’augure qui dit qu’un « jour une femme rousse aux yeux de miel instaurerait le chaos à la place de l’ordre établi », le roi Arden a demandé à vérifier que chaque enfant ne porte la marque redoutée. Mais un jour, une enfant échappe à sa vigilance. Des années après, une reine puissante et terrifiante dotée d’une beauté inouïe, règne en despote sur le royaume. Cependant, malgré ses pouvoirs et l’aide de son frère, Yelana n’a toujours pas réussi à s’emparer d’un objet précieux dissimulé dans un lieu secret. C’est là qu’intervient notre jeune héros Yoran. En tentant de sauver son village et sa femme, victimes de la malédiction du sceau, il affronte la reine. Son voyage périlleux sera celui de la fin de l’innocence. Premier tome d’une saga fantastique, Le sceau de la reine reprend les thématiques du récit initiatique. Tout en se nourrissant de l’atmosphère des contes traditionnels, l’auteure crée un univers éminemment personnel. Claire-Lise Marguier nous avait déjà impressionnés avec le très radical Le faire ou mourir, publié au Rouergue dans la collection « doado ». Intemporia est un projet qui lui est cher et qu’elle porte depuis de nombreuses années. Elle s’aventure dans un genre radicalement différent et y témoigne d’un talent tout aussi vif. Ses personnages s’imposent immédiatement. Yoran est un héros très attachant tout juste sorti de l’adolescence et plein de contradictions. Avant de le plonger dans un monde que l’on apprend à découvrir avec lui, Claire-Lise Marguier ménage ses effets et prend habilement le temps de décrire son quotidien dans son village préservé du monde extérieur, ainsi que son histoire d’amour avec celle qui deviendra sa femme. Face à lui, l’auteure compose avec un plaisir manifeste une « méchante » d’envergure avec la charismatique reine Yelana. Cette femme aux origines étranges est un des principaux atouts du roman. On ne peut que partager les impressions mêlées de son entourage et subir, entre peur et fascination, son charme ambigu. Un personnage mystérieux et complexe (qu’on laissera au lecteur le soin de découvrir) fera le lien entre la reine et le jeune homme de façon tout à fait inattendue. La fin du Sceau de la reine voit Yoran en plein examen de conscience face à des actes qu’il aura du mal à assumer. Claire-Lise Marguier laisse également en suspens de nombreuses questions qui augurent d’excitants développements à cette grande saga. Il y a dans Intemporia ce fameux souffle épique qui ravira les amateurs du genre. Mais le roman est doté de nombreuses autres qualités qui font de la nouvelle collection du Rouergue un espace où devrait pouvoir s’exercer la curiosité de lecteurs a priori moins portés sur le fantastique. On attend donc avec impatience la parution de la suite des aventures de Yoran et l’on souhaite longue vie à « épik » !