Les contes traditionnels suscitent régulièrement, de la part des auteurs, des appropriations ludiques et parfois subversives. Bel exemple de réussite que ce recueil.
Un royaume où on ne sait pas compter au-dessus de dix, des habitants qui marchent sur les mains ou se déplacent en poussette, un sabotier qui fait fortune en vendant des bûches... les sept histoires courtes, fantasques et cocasses d’Henri Meunier, auteur et illustrateur de plusieurs albums parus aux éditions du Rouergue, s’inscrivent à la lisière de l’absurde et de la raison, tout en rendant hommage aux contes classiques. On trouve des nains, des ogres, des dragons, des fous sages, des filles à marier, des prétendants, des objets magiques... L’auteur use également d’un langage précieux. Mais, à la manière de ce que pouvait faire Raymond Queneau ou tout auteur oulipien, Henri Meunier s’impose des contraintes, s’amuse avec la langue et les codes du genre. Le résultat, ce sont des récits en forme de jeux (les titres sont des rébus) truffés de clins d’œil engagés, avec une morale revisitée très moderne. Les lecteurs plus âgés liront ce recueil avec délectation, pour la critique des dérives de la société. Les plus jeunes apprécieront l’humour et l’inventivité des histoires, le piquant des situations. Pour parfaire l’hommage, les illustrations rappellent les gravures de Gustave Doré.