Bertrand Puard

À vos classiques



L'entretien par Mélanie Mignot

Librairie Le Grand Cercle (Éragny-sur-Oise)

Bertrand Puard, auteur talentueux de littérature jeunesse, nous offre une nouvelle série où il met en scène des écrivains de littérature classique dans une aventure imaginée par ses soins. Le premier tome, Alexandre, nous plonge dans l’adolescence de Dumas et le deuxième nous fait découvrir Émile Zola. Mais qui de mieux pour en parler que l’auteur en personne ?

PAGE - Comment l’idée d’écrire les aventures de jeunesse de grands auteurs vous est-elle venue ?
Bertrand Puard – C’est une série qui me trottait dans la tête depuis longtemps. Ces dernières années, j’ai fait beaucoup de thrillers pour les jeunes adultes. J’étais spécialisé dans le roman d’aventures comme pour les séries Les Effacés ou Bleu, Blanc, Sang (Casterman). J’ai donc eu une envie commune avec mon éditrice Cécile Therouanne de sortir de ma zone de confort et d’expérimenter d’autres choses. Après plusieurs discussions, on est arrivé à cette idée de raconter un épisode imaginaire dans la vie réelle de grands écrivains de langue française. Le premier volume s’intitule Alexandre et porte son attention sur Dumas que j’admire et que j’ai toujours adoré. Et le deuxième, sur Émile Zola, me tient particulièrement à cœur parce que c’est en partie grâce aux « Rougon-Macquart » que je suis devenu écrivain.

P. - À travers cette collection, qu’avez-vous envie de transmettre aux jeunes lecteurs ?
B. P. – L’idée de cette collection, c’est d’offrir une porte d’entrée dans ces grands classiques de la littérature. Je me souviens toujours de la fois où l’on m’a donné à lire un roman de Zola, c’était Au Bonheur des dames. J’étais au collège. Je n’arrivais pas à rentrer dedans et ça ne m’a pas plu du tout. Quand je l’ai relu plus tard, j’ai adoré. Je pense que c’est toujours compliqué de forcer à lire un livre. Surtout si vous ne vous entendez pas avec votre professeur de français, ce qui a toujours été mon cas. Le but de cette collection est de faire découvrir à un enfant, à travers une aventure pleine de suspens et de rebondissements, la vie et l’œuvre d’un écrivain. Cette collection amène aussi une réflexion sur la construction d’une vocation. Je reste persuadé qu’elle se dessine au cœur de l’enfance. L’idée est donc aussi de planter une graine dans l’esprit du lecteur qui ne va pas spontanément lire Le Comte de Monte Cristo ou Germinal à 9 ans, mais qui fera ses armes avec des livres plus accessibles pour un jour aller vers les grands classiques.

P. - Émile est une chasse au trésor. Avez-vous semé des petits secrets tout au long du récit ?
B. P. – Oui, ce fut un des grands plaisirs de la conception de ces romans. Dans Alexandre, il est beaucoup question du Comte de Monte Cristo. Il y a donc tout un jeu autour des personnages ou d’éléments de l’œuvre initiale. Dans Émile, on retrouve disséminés tous les éléments principaux des vingt « Rougon-Macquart ». Il est par exemple question d’un jeu de piste et les indices sont extraits de La Légende Dorée de Jacques de Voragine qui est le fondement même du Rêve, le très onirique roman de la série des « Rougon-Macquart ». Autres éléments tirés de leur vraie vie, ce sont leurs compagnons de jeu. Alexandre mène ses enquêtes avec Aglaé qui se trouve être sa première amourette. On sait peu de choses sur elle, il faut donc se plonger dans les mémoires de l’écrivain, dans les exégèses que peuvent avoir fait les grands spécialistes Claude Schopp dans le cas de Dumas, puis Henri Mitterand pour Zola. Quant à Zola, son compère n’est autre qu’un certain Paul Cézanne. Au collège Bourbon, à Aix-en-Provence, Cézanne, qui était d’un an son aîné, défendait Zola qui se faisait attaquer à cause de ses origines. Cézanne distribuait les coups de poings pour le défendre. J’ai exploité avec bonheur cette amitié extraordinaire.

P. - Comptez-vous ouvrir cette collection aux auteurs internationaux ?
B. P. – Ce serait tentant d’explorer l’enfance d’un Jack London ou encore d’un Stevenson. Pour l’instant, le troisième tome s’appellera Victor, je vous laisse deviner le nom. Pour le suivant, j’aurais plutôt envie d’aborder une figure féminine. Pourquoi pas George Sand ou encore Simone de Beauvoir, pour non seulement changer de sexe mais aussi de siècle.

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