Nous voilà arrivés au terme de l’incroyable aventure que mène Alma, l’héroïne de Timothée de Fombelle. Alors que sa famille est décimée aux quatre coins d’un monde secoué par différentes révolutions, la jeune fille va tout faire pour retrouver son frère et peut-être rentrer chez eux.
Pouvez-vous nous raconter la genèse de la saga Alma ?
Timothée de Fombelle Tous mes livres trouvent leurs racines dans mon enfance et mon adolescence. À 13 ans, j’habitais dans l’Ouest de l’Afrique et je partais avec ma famille à la découverte des forteresses blanches où, pendant des siècles, on rassemblait des hommes, des femmes, des enfants, avant de les déporter de l’autre côté de l’Atlantique. C’est ce choc-là qui a fait naître le projet, même s’il a mis encore trente-cinq ans à voir le jour.
Comment avez-vous travaillé avec François Place pour les illustrations ?
T. de F. Dans la confiance ! Depuis mon premier roman, Tobie Lolness, je sais que je peux faire confiance au talent de François. Mais cette fois, il y avait en plus son extraordinaire connaissance de l’Histoire et de toutes les littératures du voyage. Il choisit lui-même les scènes qu’il illustre. On discute ensemble quand il a terminé les crayonnés. Ensuite, il reprend le pouvoir.
Dans Alma, il y a énormément de références historiques, avec des personnages qui ont vraiment existé et qui se mêlent aux personnages fictionnels. Comment avez-vous travaillé cette documentation ?
T. de F. Il faut se servir de tout. J’ai par exemple épluché les petites annonces des journaux de l’époque qui décrivaient physiquement les esclaves en fuite. La gravité du sujet principal d’Alma m’obligeait à cette précision infinie. Le défi est de dévorer ces tonnes de livres, d’archives, de plans et de cartes, et de tout balayer ensuite pour écrire à mains nues et raconter une histoire qui parle aux lecteurs d’aujourd’hui.
À la fin du tome 2, nous avions laissé tous les personnages éparpillés à travers le monde. Les retrouvailles auront donc lieu dans ce dernier tome ?
T. de F. On ne doit pas trop en dire ! Mais oui, depuis les premières lignes, j’ai cette lumière à l’horizon. Les épreuves d’Alma sont trop grandes pour ne pas aller vers un dénouement lumineux.
Vous avez choisi d’ajouter à ce récit humaniste une touche fantastique en partant sur les « traces » du peuple Oko. Pourquoi ?
T. de F. C’est vrai, c’est un aspect discret mais important de la trilogie. Pour moi, quand la littérature se risque à faire mémoire d’un crime aussi immense que l’esclavage, elle doit le faire avec tous les moyens dont elle dispose : l’Histoire, la poésie, le tragique et même l’imaginaire ou la magie.
Quand nous découvrions Alma pour la première fois, elle était une enfant isolée avec sa famille dans une vallée assez merveilleuse. Quelques années plus tard, nous la retrouvons à Paris à quelques jours d’un certain 14 juillet. Elle cherche toujours son frère, sans savoir que le reste de sa famille a aussi quitté la vallée et est éparpillé à travers le monde. Entre aventure, Histoire, réflexion humaniste, Timothée de Fombelle a réussi à embarquer les lecteurs de tout âge sur des bateaux d’esclaves, dans les hôpitaux de la Révolution, dans les champs de café. Ce dernier tome apporte le point final à cette incroyable trilogie qui continuera longtemps à résonner en nous !